Des "crèches" au sein des centres d'accueil
Permettre aux candidat·es réfugié·es de pouvoir confier leurs enfants en toute confiance, le temps d’une formation, pour pouvoir travailler ou prendre du temps pour eux·elles : tel est l’objectif des haltes-accueil, de plus en plus présentes dans les centres d’accueil de la Croix-Rouge.
Depuis quelques années, des « espaces crèches » se créent dans les centres d’accueil, permettant aux parents de faire garder leurs enfants (âgés de 3 mois à 2 ans et demi) par d’autres résident·es du centre. Début 2020, la Croix-Rouge a souhaité développer et formaliser ces espaces d’accueil pour qu’un maximum de familles puissent en bénéficier. Un partenariat s’est récemment créé avec l’ONE, des documents de référence ont été créés pour aider les centres dans la mise en place d’un tel espace et une formation « accueillant·es » est dispensée.
Les petits bouts sont ainsi encadrés par des candidat·es réfugié·es formé·es, mais aussi par des volontaires, formé·es également.
Nada, formatrice, Ouma, résidente d’un centre d’accueil, et Geneviève, volontaire, nous racontent leurs expériences.
Nada, formatrice, revient sur les principaux objectifs et les thèmes de la formation « accueillante » :
« Renforcer les compétences des futures accueillantes : veiller au bien-être et au développement harmonieux des enfants qui leur sont confiés en milieu d’accueil tout en respectant les conditions de sécurité et d’hygiène. Et cela en mettant à leur portée des outils théoriques et pratiques par le biais d’activités ludiques.
Plusieurs thématiques sont abordées pendant cette formation : le milieu d’accueil et la sécurité – L’ONE et ses missions- Le profil de l’accueillante- l’alimentation, les soins ainsi que l’hygiène- Le développement de l’enfant et les niveaux de besoins – La maltraitance et ses conséquences- la familiarisation en milieu d’accueil- etc. ».
Ouma, résidente :
« La formation m’a beaucoup plu. Ça m’a permis de remettre des choses en cause en tant que maman. Par exemple : par rapport à la nourriture, souvent, on ne respectait pas l’âge, il peut manger telle chose à partir de tel âge. Et également, comment on s’occupe de l’enfant, à partir de tel âge, il est capable de faire ceci ou cela… En fait, c’est une rencontre de culture.
Dans ma culture, au Niger, on pense que l’enfant doit s’asseoir à partir de 3 mois, si l’enfant ne s’assied pas, on pense qu’on est une maman paresseuse. Ou par rapport à l’équilibre alimentaire, j’ai appris quelle quantité de légumes l’enfant pouvait avoir à quel âge. Chez nous, l’enfant va au sein et on lui donne du lait de chèvre, et puis à partir de 3 mois, il a de la bouillie de mile, ou de maïs, ou de sorgho, avec de l’eau. A partir de 4 mois, l’enfant mange comme nous, comme les adultes, les mêmes plats. Ici, on respecte plus les enfants, comment ils se développent, et que chaque enfant peut être différent, dans ma culture, tous les enfants font pareil. »
Le fait de collaborer avec les volontaires pour s’occuper ensemble des bébés lui parle :
« C’est intéressant, je n’ai jamais eu l’occasion de travailler avec les volontaires, mais je pense que c’est un partage, on doit certainement apprendre des choses les uns des autres ».
Geneviève, volontaire :
« Comme je suis thérapeute familiale et que je travaille beaucoup avec les adultes maintenant, c’était un bon rappel pour les enfants. D’ailleurs, j’ai une petite anecdote : quand j’ai dû langer un bébé (une poupée), je me suis gourée (rire), ça a fait beaucoup rire les participantes. »
Le volontariat est entièrement libre et que les personnes s’engagent sur base de leurs disponibilités personnelles :
« Je travaille toujours, j’ai plusieurs engagements du coup je ne suis présente que 2h/semaine à la halte-accueil. Rosiane (NDLR : collaboratrice Croix-Rouge) a dit que je devais vraiment m’engager selon ce qui me convenait, que ce soit vraiment régulier mais que cela reste un plaisir surtout. Si ça reste un plaisir pour moi, cela passe aussi dans ce que je fais je pense. »
Ce qui l’a décidé à pousser la porte du centre pour devenir volontaire ?
« J’habite tout près , à 12 km. Il y a ce centre qui est là avec toutes ces femmes, qui viennent de l’Afrique de l’Ouest, elles sont un peu confinées par leur statut. J’avais envie d’aller vers ces femmes, partager quelque chose avec elle. C’est une solidarité de femmes, avec ces femmes qui viennent d’ailleurs et n’ont pas beaucoup l’occasion de bouger de par leur situation. »
Au-delà de la possibilité, pour des parents, d’assister à des formations en confiant leur enfant à un service de garde, ce projet a également pour but secondaire de susciter des « vocations » d’accueillant·es d’enfants auprès des résident·es pour leur vie future hors du centre.