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L’accueil et la migration
13.02.2018 |

A la rencontre de Lisa, 11 ans, qui vient d'Afghanistan

Lisa a 11 ans et pourtant elle en paraît 8 ou 9. Sa physionomie chétive, sa petite taille et sa voix fluette participent à cette première impression.

Lorsque les plus grandes racontent leur vie sous le régime de Daesh en Afghanistan et le port de la burqua obligatoire, Lisa ne semble pas concernée et le dit « Moi je n’ai jamais porté de burqua ». Les autres rient et lui rétorquent « Tu restais enfermée chez toi ou quoi ? ». Mais la différence notable avec Guzal et Yalda c’est que Lisa vivait à Kaboul, la capitale, alors que les 2 sœurs elles, vivaient dans un village.  Sa réalité n’est visiblement pas celle des autres filles afghanes. Quand je lui demande si elle sait pourquoi elle est partie de son pays elle me répond « non ». Pourtant,  Lisa m’expliquera plus tard qu’en Afghanistan, un matin au réveil, ne voyant pas son père dans la maison elle demande à sa mère où il se trouve. La réponse n’est pas claire : Il n’est pas rentré, c’est tout. Le lendemain de cette disparition, sans expliquer pourquoi, sa mère décidera de fuir avec elle et ses frères et sœurs. Lisa est sans nouvelle de son père depuis ce matin-là. Cela fait maintenant 3 ans.

Lisa  raconte les moments qui l’ont marqué pendant le voyage. «  On était tout en haut de la montagne avec plein d’autres personnes, d’autres gens qui partaient de leur pays et on voyait les lampes de la police qui cherchaient les gens dans la nuit. On devait rester allongés dans la neige. Mais un chien s’est mis à aboyer très fort. Tout le monde s’est arrêté de respirer. On ne savait pas quoi faire. Les lampes arrivaient de notre côté alors un homme a pris un paquet de biscuits dans son sac, à rampé vers l’animal et lui a tendu. Comme il s’est mis à manger les biscuits, on a pu passer. Je tremblais très fort. »

Elle m’invite à rencontrer sa mère et voir leur « maison » comme elle l’appelle. Les lits sont disposés de sorte qu’il y a une place pour un petit coin cuisine bien organisé. Des étagères ont été posées et chaque objet a sa place. Lisa me prend la main en s’impatientant « Viens voir ma chambre ! ». Autour de la couchette où elle dort, comme sur tous les autres lits du centre, sont posés des rideaux permettant une certaine intimité. Elle en ouvre les pans comme elle ouvrirait la porte d’un lieu secret. Ce qu’elle voulait me montrer se trouve sur le mur contre lequel est placé son lit : des dessins de cœurs, de fleurs et des photos d’elle et ses camarades de classe. Sa chambre est à l’image du monde qu’elle veut se construire ici tant bien que mal, loin de la noirceur et de l’univers des adultes.

Elles s’appellent ZAHRA et MARYAM et viennent d’IRAN. C’est dans ce pays que leurs parents avaient décidé de se réfugier pour fuir le climat oppressif d’Afghanistan. Pourtant c’est en Iran qu’ils expérimenteront le rejet, le racisme et la violence. « On est des rien du tout. On nous tue comme des animaux là-bas » dénonce Maryam. Zara, appuyant les propos de sa sœur raconte la fois où elles croisent des hommes armés de couteaux qui réclament tous leurs biens. Les filles doivent tendre les bras vers les ravisseurs qui passent leurs lames aiguisées sur leurs poignets tremblant afin d’arracher les bijoux qui les ornent. Zara en garde des cicatrices dont la taille laisse imaginer la profondeur des entailles faites ce jour-là. Les stigmates d’une vie injustement cruelle.


Découvrez Lisa et de nombreux autres enfants dans le film « Je n’aime plus la mer » d’Idriss Gabel, retraçant la migration à travers les yeux des enfants. Retrouvez toutes les informations et les dates de diffusion sur la page officielle du film.

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