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L’accueil et la migration
03.03.2016 |

L'accord UE-Turquie: un manque d'empathie et d'humanité

L'accord UE-Turquie: un manque d'empathie et d'humanité

L’accord UE-Turquie: un manque d’empathie et d’humanité

21 Croix-Rouge européennes unies face à l’urgence humanitaire catastrophique en Grèce : « L’accord conclu entre l’Union européenne et la Turquie reflète un manque d’empathie et d’humanité »

Nous, Sociétés nationales de la Croix-Rouge, exprimons notre profonde inquiétude face aux répercussions humanitaires engendrées par l’accord signé récemment entre l’Union européenne et la Turquie visant à freiner l’afflux de migrants en Europe.

En effet, nous craignons que sa mise en place nuise au droit international et européen des réfugiés et au droit de l’homme. Nous tenons à souligner que les efforts entrepris par l’Union européenne et ses États membres pour faire face à la crise humanitaire doivent pleinement se conformer aux obligations internationales. Cela implique avant tout l’obligation de respecter le droit de tout demandeur d’asile à demander l’asile et à avoir accès à des procédures justes et efficaces de détermination du statut de réfugié. Il est également de leur devoir d’assurer la protection contre le refoulement, y compris le « refoulement en chaîne », quelles que soient les circonstances.

Les négociations politiques concernant le nombre, les arrangements financiers et les tentatives de fermeture des frontières, masquent la situation désespérée de milliers de personnes vulnérables –hommes, femmes, pères, mères et enfants — qui mettent chaque jour leur vie en péril dans le but de se mettre en sécurité en Europe. Nous estimons que l’accord conclu entre l’Union européenne et la Turquie reflète un manque d’empathie et d’humanité. Les contrôles aux frontières effectués au hasard et la criminalisation des déplacements irréguliers tendent à exposer les plus vulnérables, notamment les femmes et les enfants, à des risques plus importants, tels que la séparation familiale, les abus sexuels, la traite d’êtres humains, la violence et la mort.

Nous l’avons observé à maintes reprises : à la fermeture des frontières, de nouveaux itinéraires voient le jour.

C’est une urgence humanitaire catastrophique qui a vu le jour en Grèce.

Il s’agit d’une crise européenne qui requiert de vraies actions concrètes de solidarité entre les Etats. On ne peut attendre de la Grèce ni de la Turquie qu’elles prennent en charge, seules, tous les migrants arrivant sur leur territoire.

En dépit des efforts de l’Union européenne d’arrêter les flux de migrants vers la Grèce, environ 1000 migrants vulnérables continuent de débarquer sur les îles grecques chaque jour. Selon le HCR, 164.338 arrivées par mer ont déjà été enregistrées au 28 mars pour l’année 2016. On estime à près de 45.000 le nombre de personnes piégées en Grèce dans des conditions épouvantables.

Suite à la signature de l’accord UE-Turquie, des milliers de personnes ont été transportées des îles grecques vers le continent, engendrant ainsi confusion et panique. Il est probable que ce déplacement des populations aggrave encore les conditions humanitaires déjà précaires que rencontrent les migrants sur le continent.

Tandis que le les Sociétés nationales de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge vont continuer à fournir l’assistance et la protection aux migrants vulnérables tout au long de leur parcours migratoire, les Etats Membres de l’UE doivent conjointement prendre leurs responsabilités pour trouver des solutions durables et plus humaines.

Nous nous félicitons des engagements pris par les États membres de l’UE concernant la réinstallation et la relocalisation des migrants. Compte tenu de l’ampleur de la situation, les efforts fournis doivent être plus conséquents et mis en œuvre d’urgence, en coordination avec d’autres plans d’action qui assurent aux migrants un accès à la protection, tels que la délivrance de visas humanitaires et la réunification familiale.

D’après notre expérience, plus de 40% des Syriens qui arrivent sur les îles grecques ont pour but de rejoindre des membres de leur famille déjà présents en Europe

Nous sommes convaincus que les États membres de l’UE et les Croix-Rouge d’Europe doivent surmonter ce défi ensemble. Nous attendons de nos gouvernements qu’ils agissent davantage et sommes prêts à leur apporter notre appui. Nous encourageons donc l’UE à :

  • Maintenir l’accès pour tous les migrants à une assistance et une protection humanitaire tout au long de leur route migratoire, y compris aux frontières et dans les « hotspots », et ce indépendamment de leur nationalité ou de leur statut.
  • Garantir que les Sociétés nationales de la Croix-Rouge bénéficient d’un accès effectif à tous les migrants, et ce indépendamment de leur statut juridique, pour pouvoir leur prêter assistance et protection sans toutefois être pénalisées.
  • Garantir que tous les demandeurs d’asile disposent d’un droit effectif à faire une demande de statut de réfugié  et reçoivent une protection conformément à la Convention des Nations Unies relative au statut des réfugiés et à la législation en vigueur dans l’UE.
  • Créer davantage d’opportunités concernant des voies d’accès sûres et légales en Europe, notamment grâce à la réinstallation des migrants, à la délivrance de visas humanitaires et au processus de réunification familiale
  • Mettre en place des opérations de recherche et de sauvetage dédiées à la situation sur l’ensemble du bassin méditerranéen et garantir une assistance aux migrants en difficulté.
  • Donner la priorité à la coopération entre États pour garantir une assistance continue, sûre et sans entraves aux victimes de conflits ou de violence. Des solutions durables concernant ces conflits doivent être trouvées. Dans le cas contraire, ces personnes n’ont d’autre choix que celui de quitter leur foyer pour garantir leur sécurité et celle de leur famille.

L’accord entre l’Union européenne et la Turquie prévoit que pour chaque Syrien renvoyé en Turquie au départ des îles grecques, un autre Syrien sera réinstallé de la Turquie vers l’UE. L’accord prévoit également que tous les nouveaux migrants en situation irrégulière qui partent de la Turquie pour gagner les îles grecques à partir du 20 mars 2016 seront renvoyés en Turquie. Les coûts de ces opérations de retour seront pris en charge par l’UE.

Cette tribune est signée par 21 Croix-Rouge européennes, dont la Croix-Rouge de Belgique.

Comment aider la Croix-Rouge

L’effort humanitaire de la Croix-Rouge est intense depuis le début de la crise migratoire, mais malheureusement, en raison du nombre élevé de réfugiés qui continuent d’arriver, ce n’est pas suffisant.

Vos dons sont nécessaires pour:

  • Soigner les malades
  • Nourrir et fournir de l’eau aux familles.
  • Protéger les réfugiés de l’hiver et des intempéries grâce à la distribution de couvertures, bâches, abris.